En Afghanistan, la lutte contre la culture du pavot semble être un défi de taille pour le gouvernement taliban. Malgré un décret d'interdiction émis par le chef suprême des talibans, l'Office des Nations unies contre la drogue et le crime (ONUDC) révèle une recrudescence de cette culture illicite. La situation met en lumière les difficultés économiques et logistiques auxquelles sont confrontés les paysans dans l'un des pays les plus pauvres de la planète.
Cette résurgence est un coup dur pour les autorités talibanes, qui peinent à imposer des alternatives agricoles viables. Alors que des infrastructures adéquates pour une agriculture légale font défaut, la pression sur les ressources en eau s'accentue, poussant les agriculteurs à revenir à la culture du pavot, plus lucrative et moins gourmande en eau.
Le pavot afghan défie l'interdiction talibane
Une culture interdite en plein essor
Les derniers chiffres de l'ONUDC sont sans appel : la culture du pavot en Afghanistan a connu une augmentation de 19% en 2024, occupant désormais 12'800 hectares. Une expansion significative, bien que modeste par rapport aux 232'000 hectares enregistrés avant l'émission du décret d'interdiction en avril 2022. Cette résilience du pavot démontre l'attrait économique persistant de cette culture pour les paysans afghans, qui dépendent fortement de l'agriculture pour leur subsistance.
Controverses et réactions officielles
Le rapport de l'ONUDC a été fermement réfuté par Abdul Mateen Qani, porte-parole du ministère de l’Intérieur afghan. Il insiste sur le fait que les données de l'organisation sont obsolètes et ne reflètent pas les efforts récents pour éradiquer les champs de pavot. Cependant, les campagnes de police pour détruire les plantations ont été marquées par des violences, notamment dans la région du Badakhshan, où des affrontements ont causé la mort de plusieurs personnes.
Économie du pavot et défis agricoles
La sécheresse du pavot, qui sert à produire opium et héroïne, est passée d'environ 100 dollars le kilo avant 2022 à 730 dollars le kilo, selon l'ONU. Cette flambée des prix rend la culture du pavot encore plus attractive pour les agriculteurs. En parallèle, les cultures de substitution peinent à convaincre : elles sont moins rentables et nécessitent davantage d'eau, une ressource de plus en plus précieuse dans la région.
Le défi des infrastructures pour une alternative viable
L'International Crisis Group (ICG) souligne l'impératif de développer des infrastructures adaptées pour encourager une agriculture légale. Cela comprend l'amélioration de l'irrigation, la mise en place d'équipements de stockage réfrigéré et la construction de meilleires routes. Face à ces exigences, les talibans semblent dépassés, ne disposant pas des fonds nécessaires pour investir dans de telles infrastructures. En conséquence, avec un opium plus cher, la tentation de violer l'interdiction reste élevée chez les agriculteurs.
Conclusion
Face à ces constats, la question de la culture du pavot en Afghanistan demeure une équation complexe à résoudre. Entre les besoins économiques immédiats des paysans et les impératifs de développement à long terme, le chemin vers une agriculture durable et légale reste semé d'embûches. L'avenir dira si les autorités afghanes et la communauté internationale pourront trouver un terrain d'entente pour éradiquer définitivement la culture du pavot.